vendredi 8 mars 2013

Decem mensium


      Durant ces dix derniers mois elle n’a cessé de l’attendre, d’espérer un geste de sa part, un signe, une photo, quelques murmures, n’importe quoi de sa part lui redonnera gout à la vie;  elle n’osait même plus penser qu’un jour tout redeviendra comme avant , elle ne désirait plus grand chose de la vie, surement pas le bonheur -elle n’y croyait plus depuis longtemps-. Elle savait qu’il ne lui pardonnera jamais son départ... D’ailleurs, ce n’était pas non plus un quelconque pardon qu’elle attendait mais juste le soulagement de savoir qu’il a su encaisser , qu’il a continué à vivre et à aimer, qu’il n’ a pas trop souffert, qu’il s’est battu pour son propre bonheur... tout simplement qu’il l’a oublié.

     On frappa à la porte de sa chambre pour le déjeuner, comme hier elle refusa de descendre , elle n’en veut plus de ces voix qui l’entourent, qui guettent ses faiblesses, qui savourent ses angoisses et rejettent sur elle les jugements les plus affreux et les plus insultant.  Mais la voix est insistante, c’était celle de sa mère qui la supplia de descendre.  Sa voix tremblante lui fracassa le coeur,  elle s’éloigna du lit et ouvrit la porte , fixa sa mère d’un regard chagriné pour un court moment puis elle le détourna vers les rideaux qui couvraient l’unique fenêtre de sa chambre... Pour elle au delà de la fenêtre il était toujours là , il l’observait, il veillait sur elle. Depuis dix mois ces rideaux étaient pour elle le seul obstacle qui la séparait de lui. Sa chambre fut pour des mois son confessoir, chaque matin elle parlait pour de longues minutes, espérant qu’au delà des rideaux il était là à l’entendre.

      Désespérée, sa mère quitta la chambre en claquant la porte laissant derrière elle des larmes et des rêves inachevés.